Colonel Ali Seibou Hassane, Directeur général de la SONIDEP : « La SONIDEP dispose déjà d’un savoir-faire incontestable qui va se renforcer à l’avenir pour lui permettre d’être un acteur dans toutes les activités du secteur pétrolier »
Monsieur le Directeur Général, récemment deux Contrats de Partage de Production (CPP) permettant à la SONIDEP de disposer des blocs pétroliers ont été signés et cela suite à une décision du Gouvernement datant du 2 mars 2024. Dites-nous un peu plus sur ces contrats.
Oui en effet. Je confirme que par Décret N°2024-196/P/CNSP/MPe et Décret N°2024/197/P/CNSP/MPe, pris en Conseil de Ministres en date du 2 mars 2024, ont été approuvés les Contrat de Partage de Production (CPP) relatifs aux blocs R5-6-7 et au bloc pétrolier Bilma, ayant donné lieu à l’attribution des Autorisations Exclusives de Recherche y relatives en date du 26 mars 2024.
Je tiens à souligner qu’au Niger, le domaine pétrolier est bien encadré par des lois en l’occurrence la loi 2017-63 du 04 août 2017 portant code pétrolier. A cet effet, toute société souhaitant entreprendre des opérations pétrolières a l’obligation de se conformer aux prescriptions de la loi 2017-63 du 04 août 2017 portant code pétrolier et cela en déposant un dossier de demande d’Autorisation Exclusive de Recherche (AER), conformément aux exigences contenues dans ladite loi, et nécessitant au préalable la signature d’un Contrat de Partage de Production approuvé par décret pris en Conseil des Ministres.
Qui parle de CPP, parle d’engagements. La société nationale SONIDEP a pris l’engagement ferme de réaliser pour chacun des deux blocs pétroliers un Programme de Travail Minimum dans le délai imparti.
Alors comment les choses vont se traduire concrètement sur le terrain ?
Je rappelle que la SONIDEP existe depuis 1977, soit un peu moins de cinquante (50) ans aujourd’hui. Elle a pour vocation principalement l’approvisionnement du Niger en hydrocarbures et produits dérivés de qualité à travers, bien entendu, la distribution par le canal de ses dépôts implantés dans toutes les régions.
A cette activité, ont été ajoutées, comme dans la plupart des pays producteurs de Pétrole, les activités relevant de l’amont pétrolier, c’est-à-dire la recherche, le développement et la production de pétrole. C’est donc une nouvelle activité qui nécessite d’apporter une attention à certains facteurs de succès clés. Ces facteurs sont essentiellement l’accompagnement financier et/ou technique selon les besoins, nécessitant la signature d’un ou plusieurs partenariats (financier, stratégique, technique, ingénierie, etc.), la création d’une filiale de SONIDEP opérationnelle dédiée à l’amont qui sera l’interlocuteur des partenaires dans la mesure où elle a vocation à être rapidement autonome, l‘établissement d’un calendrier clair dont la première étape consistera à réaliser un certain nombre d’études préalables, notamment des études G&G (géologiques et géophysiques) dont le but est de permettre la réévaluation des réserves et aussi d’analyser les études G&G existantes. Il y a également la réalisation de tests de puits (pour les puits existants) dont l’objectif est de lever les incertitudes liées à la capacité de production, la réalisation des études de faisabilité et du plan de développement qui détailleront les actions à mener ainsi que les coûts y afférents, la soumission d’une demande d’Autorisation Exclusive d’Exploitation (AEE), la réalisation de plusieurs forages additionnels dans le cadre du développement des différents champs en vue de leur mise en production ainsi que la construction des installations de surface en vue de la collecte, du traitement et de l’évacuation du pétrole brut vers un système de transport (vers une raffinerie ou un pipeline export) et enfin la connexion de ces installations de surface au système de transport des produits (installations de transport). Je puis vous dire que tout cela se fera avec la filiale SONIDEP.
Quelle est la plus-value pour la SONIDEP de disposer des blocs pétroliers quand on sait qu’il y a déjà des acteurs sur le terrain ?
Pour faire simple, je dis que la première plus-value reste la souveraineté ouvrant le portail à l’autonomisation. Aussi, il faut souligner que la vision d’une société nationale est différente de celle d’autres acteurs privés. Elle s’inscrit dans la gestion à long terme des ressources pétrolières du pays en bon père de famille, sans forcément rechercher les gains à court-terme qui peuvent parfois ne pas s’aligner avec une politique prudente.
Sachez que la SONIDEP est l’Opérateur National dans le secteur pétrolier amont. Tout projet concernant le domaine pétrolier, comme c’est le cas pour les mines avec la SOPAMIN, concerne directement la SONIDEP et en premier chef. C’est pourquoi elle est aujourd’hui un partenaire incontournable pour l’ensemble des acteurs dans le secteur.
Les blocs revenant à la SONIDEP sont-ils immédiatement exploitables ou bien il va falloir mener des travaux d’exploration ?
Il faut tout de suite dire que les blocs R5-6-7 nécessitent des travaux de recherche beaucoup plus soutenus, tandis que les travaux de recherche, déjà réalisés sur le Bloc Bilma, ont déjà permis de faire des découvertes des réserves. Des réserves qui pourront être exploitées dans un avenir proche. Cependant, le bloc Bilma nécessite pour sa part la réalisation d’études techniques additionnelles que nous allons entreprendre rapidement, notamment concernant l’estimation de ses réserves afin de pouvoir calibrer les profils et les installations de production. La réalisation de ces études prendra quelques mois.
La SONIDEP va-t-elle produire et commercialiser le pétrole à l’intérieur, dans la sous-région et à l’international une fois que ces blocs sont mis en exploitation ?
Nos ambitions pour le pays sont sans limites. La SONIDEP n’envisage pas aujourd’hui de se limiter ni de se réduire au seul marché national. Toute possibilité de production et de commercialisation sera à étudier en fonction des intérêts et de la stratégie du Niger.
Après la signature de ces Contrats de Partage de Production (CPP), quand est-ce que le projet démarrera ?
Pour le démarrage, nous sommes dans la phase de recherche du ou des partenaires techniques et/ou financiers à même de s’inscrire dans la stratégie du pays. La procédure de sélection de ce ou ces partenaires est en très bonne voie.
Avec ces blocs, la SONIDEP peut avoir la possibilité de disposer de ses propres moyens pour mener des recherches, de posséder sa propre raffinerie ou de se mettre en consortium avec d’autres partenaires, avec d’autres grands groupes pour développer une véritable industrie pétrochimique ?
Oui, la SONIDEP dispose déjà d’un savoir-faire incontestable qui va se renforcer à l’avenir pour lui permettre d’être un acteur dans toutes les activités du secteur pétrolier. Cela nécessite la création d’une filiale dédiée qui sera l’acteur central du secteur et avec laquelle les partenaires devront nécessairement s’associer, s’ils veulent entreprendre des opérations pétrolières au Niger. Le rôle de la filiale sera de s’occuper de tous ces aspects, allant de la recherche jusqu’à la production à terme. Concernant sa propre raffinerie, vous savez comme on aime le dire : tout ce qui appartient à César, doit revenir à César.
Cette signature ouvre-t-elle la voie au Niger de disposer de sa propre compagnie nationale à l’image de l’Algérie voisine ?
La Compagnie Algérienne, c’est la SONATRACH, qui fait sa fierté. Pour le Niger, nous avons notre société nationale, elle s’appelle la SONIDEP depuis le 2 mars 2024. La SONIDEP doit disposer de tous les moyens nécessaires pour lui permettre le même destin que les autres sociétés nationales qui font la fierté de leurs pays.
Je tiens à saluer le Président du CNSP, Chef de l’Etat, le général Abdourahamane Tiani pour cette volonté patriotique et souverainiste, originelle d’avoir accepté de mettre la SONIDEP dans ses droits. Je demande aux nigériens de ne pas se faire tromper, de faire bloc derrière la SONIDEP qui est leur bien et qui, inchaa Allah, amènera le Niger vers l’apothéose incontestablement.
Zabeirou Moussa (ONEP)