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Amères vérités : On ne décrète pas le progrès, on le construit

Techniquement, il n’y a pas une seule université nigérienne disposant d’infrastructures modernes en matière de technologies. Les cours en ligne restent d’autant plus problématiques que les conditions objectives qui les rendent possibles n’ont jamais existé. Et ce n’est pas du jour au lendemain que l’on peut réaliser, en un coup de baguette magique, ce qui se construit. On ne décrète pas le progrès, on le construit. Le programme « un étudiant, une tablette » est une chimère au regard de la gouvernance qui prévaut. L’école, c’est el cadet des soucis du gouvernement. Si ce ne sont pas les moyens qui manquent, c’est la volonté politique, les préoccupations de nombreux gouvernants actuels étant plutôt tournées vers les stratagèmes à mettre en place pour faire main basse sur les ressources publiques. Et comme l’impunité totale est garantie, ceux qui ont détourné des milliards et qui en jouissent en toute tranquillité, font des ouailles. D’ailleurs, ce programme « Un étudiant, une tablette » est-il toujours d’actualité ? Ce n’est plus sûr puisque, avant même que les enseignements en ligne ne soient en préparation au niveau des enseignants, le gouvernement a décidé, contre toute attente, de la réouverture des classes.

Au niveau du primaire et du secondaire, de nombreuses classes en paillottes doivent être restaurées en vue d’accueillir les élèves pour les 45 jours décrétés par le gouvernement. Mais, peuton raisonnablement garder des élèves dans des classes en paillottes en pleine saison pluvieuse ? C’est pourtant la trouvaille du gouvernement, histoire de se donner bonne conscience quant au sort de l’année scolaire. En réalité, à partir de juin, il n’y a plus véritablement d’école au Niger, du moins au primaire et au secondaire. Même à Niamey, de nombreuses classes en paillottes vont devoir fermer aussitôt qu’on les rouvre. Là également, les efforts chantés du gouvernement sont là, dans leur nudité indiscutable. Les classes sont surpeuplées et on demande aux enseignants et aux directeurs d’école de faire du miracle en respectant les mesures barrières dans le cadre de la lutte contre le COVDI 19. Comment vont-ils faire avec la distanciation d’un mètre entre les élèves pour des classes de plus de 80 élèves parfois ? À coup sûr, le gouvernement s’est débarrassé de la patate chaude à moindre coût.

En un mot comme en mille, ce qu’il y a à retenir, c’est que le résultat du refus ostentatoire d’investir dans les secteurs sociaux de base est là. L’enseignement supérieur manque pratiquement du minimum requis en matière d’équipements technologiques modernes tandis que le secondaire et le primaire, y compris dans les grands centres urbains comme Niamey, sont truffés de classes en paillottes qui rendent insensée la décision du gouvernement de prolonger l’année scolaire du 1er juin au 15 juillet 2020. Dans le Niger profond, c’est démentiel de vouloir garder à l’école les enfants, main d’oeuvre des parents dans les travaux champêtres. Et le gouvernement le sait. Il le sait mais s’en fiche, l’essentiel pour lui étant d’atteindre les objectifs politiques qu’il s’est fixés.

Autant la lutte contre le COVID 19 a permis de mettre à nu les efforts chantés du gouvernement pour l’école, autant, demain, lorsque soufflera un nouveau vent de gouvernance, les Nigériens découvriront la face hideuse d’une gouvernance qui a été faite pour des individus et non pour le Niger. Le rapport d’audit du ministère de la Défense nationale en est, entre autres, une preuve de poids.

BONKANO
24 mai 2020
Source : Le Canard En Furie