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Lettre au “président de la République” : Monsieur le “Président”, Si vous aviez été à l’opposition, il y a longtemps, depuis la découverte de cette commande clandestine de maître Souna, que vous auriez sonné la mobilisation pour un boycott actif du proces

Monsieur le ‘’Président’’,
Je suis au regret de vous dire que vous vous étiez complètement passé à côté de la plaque en faisant cette malheureuse comparaison entre le Niger, la France, les États Unis, l’Italie, entre autres, à propos du droit de manifester. En affirmant, dans l’ignorance totale de ce qui se fait en Occident, notamment en France, vous avez prétendu que, pas plus à Paris, à Rome ou aux États Unis, l’on n’acceptera pas que des citoyens manifestent de nuit. C’est dommage, car en France notamment, vous ne pouvez pas compter le nombre de manifestations nocturnes. D’ailleurs, pour démentir vos propos, aussitôt que vous avez commis cette bourde, des reportages télévisés sur des manifestations nocturnes, dont une est appelée « Nuit debout », ont circulé sur les réseaux sociaux. Cela m’a affligé de voir que l’homme qui représente le peuple nigérien au plus haut degré s’emmêle ainsi les pinceaux en Occident. Bref, vous avez fait gravement sourire votre auditoire. Je suis certain que beaucoup de vos interlocuteurs s’interrogent. Hé, mais qu’est- ce qu’il est en train de raconter ? J’ai répondu que vous racontiez à des gens que vous pensez très éloignés du Niger pour comprendre ce qui s’y passe, le Niger tel que vous le croyez. Et comme tous ceux qui vous ont écouté, j’ai été scandalisé lorsque vous aviez dit qu’il y a au Niger deux catégories de société civile, l’une qui est pro- démocratique, l’autre qui est putschiste ; que ces acteurs de la société civile que vous avez incarcérés ont combattu tous les régimes démocratiques. Une déclaration grave de connotation dans la mesure où ce sont les mêmes derrière lesquels vous vous étiez abrité durant plusieurs années pour faire votre combat politique.

Monsieur le ‘’Président’’,
De quels régimes parlez-vous lorsque vous affirmiez que ces acteurs de la société civile ont combattu tous les régimes démocratiques ? Celui du Président Baré que vous traité de tous les noms d’oiseau ? Ou bien celui de Mamadou Tanja que vous avez combattu pour son entreprise anticonstitutionnelle ? À moins que vous ne fassiez allusion à un régime qui n’a jamais vu le jour au Niger, vos propos ont vivement inquiété tous ceux qui vous ont écouté et je dois reconnaître que je ne trouve pas de compréhension possible à cette déclaration. J’ai posé et reposé la question autour de moi, rien que des interrogations et des spéculations. Avec cette prestation médiocre devant la presse française, vous ne pouvez, évidemment, que rajouter à la perplexité d’une opinion publique française à laquelle vous accordez plus d’importance qu’à ce que pensent de vous vos compatriotes. Vous avez, en un mot, ajouté de l’eau au moulin de tous ceux qui, personnes physiques et morales dans l’Hexagone, se battent pour que la France fasse honneur à ses valeurs proclamées en mettant au pilori votre régime. Croyez-moi, des gens comme Jean-Luc Mélenchon ne lâchent le morceau facilement. Et la presse française, dont vous avez fait le procès à travers une mise au vert publique de RFI, ne vous lâchera pas aussi facilement les basques. Quant aux ONG internationales que vous avez brocardez comme étant ignorantes des réalités du Niger, il est certain que vous avez davantage facilité désormais leur plaidoyer.

Vous aviez déclaré que de manière irrévocable, vous ne modifierez pas la constitution et vous ne briguerez pas un troisième mandat. Au Niger, seuls vos affidés accordent du crédit à votre propos. Pour la majorité des citoyens nigériens, ce n’est qu’une simple profession de foi, comme vous en faites régulièrement. Ce n’est pas, de toute façon, ce qui m’intéresse. Ce qui m’intéresse, c’est cette volonté de manipulation du processus électoral qui débute plutôt mal. Votre commission électorale et votre joker, maître Souna, ont déjà été pris la main dans le sac avec cette commande clandestine de pièces d’Etat- civil. Tout le monde a compris, sauf, bien sûr maître Souna qui fonce, tel un bison affolé, vers la réalisation de sa mission. J’ai appris qu’il a d’ailleurs subitement accéléré sa sordide entreprise en procédant au transfert dans les régions de ses registres d’actes de naissance, d’actes de mariage et d’actes de décès. Tout, dans sa façon de faire, le trahit et son entêtement à poursuivre cette mission insolite le perdra assurément.

Monsieur le ‘’Président’’,
Je dois avouer que quelques fois, je me dis que l’opposition, regroupée désormais au sein du Front pour la démocratie et la République (FDR), est votre plus grand allié. Car, je le sais, et personne ne le contesterait certainement, que si vous aviez été à l’opposition, il y a longtemps, depuis la découverte de cette commande clandestine de maître Souna, que vous auriez sonné la mobilisation pour un boycott actif du processus d’enrôlement. Je suis certain que vous auriez depuis longtemps demandé à tous les citoyens nigériens, partout où ils vivent, de ne pas accepter de se faire enrôler ; que, accepter de le faire, c’est cautionner la dictature rampante et que chaque Nigérien doit nécessairement refuser de marcher dans la combine. Comme vous, à la place des partis et des organisations de la société civile membres du FDR, je ferais la même chose. Je sonnerais tout de suite la mobilisation, battrait villes et campagnes pour demander à tous les Nigériens de refuser de se faire enrôler et de chasser, au besoin les commis qui viendraient les importuner pour ça. Je publierais des communiqués, je parlerais dans les radios, j’irais sur les plateaux de télévision, je ferais des meetings, j’enverrais des missions dans tous les chefs-lieux de région pour ameuter les populations sur les risques qu’ils font courir au Niger, à la démocratie et à la citoyenneté libre en se faisant enrôler. Bref, je croiserais le fer, dès à présent, avec le régime dans la mesure où le rapport des forces populaires est de mon côté.
Monsieur le ‘’Président’’,
Je suis certain que si vous étiez le FDR, même le Ramadan ne vous arrêterait pas.
Mallami Boucar

23 septembre 2018
Source : Le Courrier