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In Memoriam ! PIERRE NIGNON, Ancien Lycéen, Ancien Banquier du développement, discret et efficace


Pourrais-je donc survivre à un refus de témoignage après la perte cruelle de mon grand frère PIERROT, connu dès le début des années 60, lui qui a comblé de joie tant de lycéens de notre génération et fait notre fierté ? Quels pans de sa vie exposer à la lumière du jour, d’autant plus qu’" Écrire pour le public est une rude besogne où l'attention est toujours en éveil pour choisir et critiquer tous les matériaux fournis par la spontanéité …écrire pour soi, ce n'est plus travailler, c'est respirer. Respirons donc, traçons ces lignes au hasard de l'émotion et de la pensée, sans les voir naître et finir, surtout sans les relire ; que la plume sténographie machinalement le poème intérieur, triste ou gai " comme l’a si bien dit Sully Prudhomme dans son       « Journal intime » du 14 juin 1868 ?

C’est décidé : je parlerai de ce que je sais de l’homme, Sans aucun fard !
En pareille circonstance,nous le savons tous, que de souvenirs quidéfilent à une cadence insoupçonnée. Des plus lointains aux plus récents. Et le couperet de notre jugement de l’homme tomber en quelques fractions de secondes. PIERROT fut un bon type.
Que retenir des tranches de vie vécues avec le grand frère PIERROT, ce lycéen rencontré dans les années 60 dans le quartier nouveau marché et plus tard au Lycée National (actuel Lycée Issa Korombé), où nous avons partagé cinq bonnes années intenses de vie associative du temps où ce temple du savoir méritait amplement son nom ?

Tranches de vie suffisantes pour apprécier les qualités de l’homme.
Que retenir de l’homme, me demanderez-vous ? Je vous répondrai que Pierrot c’est un esprit sain dans un corps sain ! Sans calcul aucun ! Toujours égal à lui-même, de bonne humeur, toujours attentif, toujours respectueux, même vis-à-vis deses petits frères que nous sommes qui lui devons le respect. C’est ce que nous retenons de l’homme. Et de son éternel sourire amical de bienveillance….
Pierrot, c’est ce féru de BASKET, à la mise impeccable, à la détente de félin qui a fait la fierté de plus d’un lycéen lors des mémorables derbies d’avec nos rivaux de l’époque, à savoir, les AS PTT, FAN, EAMAC, et que sais-je encore…. C’est aussi ce joueur hors pair aux 20 (vingt) rebonds fabuleux et dix (10) passes décisives par match, aux shoots suspensifs dont on se souviendra longtemps encore comme si c’était hier. Ce, malgré les deux quarts de siècle nous séparant de la faste période. Sur le terrain de basket du terrain municipal ou du lycée, la balle orange est ronde pour tout le monde. Pas de tricherie possible. Ah, la belle époque ! Les coups bas, les méchancetés gratuites, les fausses promesses étaient alors inconnus. Les lecteurs et adeptes de Machiavel faisaient leurs apprentissages au REX, au VOX, au « Franco » et autres hauts lieux de la « civilisation » du Niamayzé qu’il était.

De sa vie professionnelle, retenons d’emblée que l’homme a très tôt pris ses distances avec l’Administration centrale pour servir son pays avec abnégation à la Représentation locale de la Banque mondiale. La Banque mondiale, où n’entre pas qui veut, il y croyait fortement. Tenez, lors de notre rencontre, il y’a quelques mois, à l’occasion d’un autre départ cruel d’un proche, le grand frère m’avait paru désabusé. Rien ne marche tout est verrouillé avait-il tranché.

Comme tous ceux qui ont choisi d’être Economiste, PIERROT a sûrement dû mal vivre la première place occupée par notre pays dans le classement de l’lndice du  …Sous-Développement Humain. Comment pouvait-il en être autrement quand l’on a consacré toute sa vie active à l’atteinte de l’objectif de l’amélioration des conditions de vie de ses compatriotes ? Mais connaissant l’homme, il a dû prendre cette épreuve avec philosophie en gardant l’espoir qu’une autre génération allait relever le défi. Après tout, notre pays, comme l’a si bien dit l’autre, « est riche mais mal géré….. »

Sa vie il l’a consacré à sa passion, l’Economie. Les joutes oratoires, le marxisme, le communisme, le maoïsme,  le socialisme, le stalinisme, le machiavélisme et tous ces suffixes barbares en isme, il ne connaît pas. Son seul credo, le travail. Il n’en a pas eu besoin d’user de machiavélisme et de coups en-dessous de la ceinture pour s’émanciper. Le talent était inné chez lui…
Très tôt, Pierrot a rencontré l’âme sœur, en la personne de Haoua, l’une de ses douces moitiés. Elle l’a choisie, ou alors si vous préférez ils se sont choisis et ont pris comme  leitmotiv : pour bien vivre, vivons cachés. Puisque "Le sentiment de ne pas être aimé est la plus grande des pauvretés" Comme l’a dit Mère Teresa. Lui était riche. Très riche. Riche de l’amour des siens, de l’amour de ses douces moitiés, de ses amis, de ses anciens coéquipiers. Amour, qui l’a forgé et maintenu dans la générosité de cœur et d’esprit puisqu’Alexandre Dumas, fils nous enseigne que  "Par les déceptions de fortune et d'amour, par les événements du cœur, on n'arrive qu'à la science étroite de l'égoïsme. Jean Jacques Rousseau, nous l’a dit et nous en sommes convaincus : « l’homme est fondamentalement bon et innocent, mais que c’est la société dans laquelle il est placée qui le corrompt et le dénature, faisant ainsi de lui quelqu’un de méchant ». "Les « Gnamaizés »me comprendront sur le cas de Pierrot …puisque notre Niamey de solidarité de bonté et d’insouciance des années post indépendance est « gâté » comme disent nos frères ivoiriens.

PIERROT  n’avait donc aucune raison d’en vouloir à la vie, et donc d’avoir l’insulte à la bouche comme seul faire-valoir à l’instar de ces compatriotes qui nous tympanisent et polluent notre existence. La vie lui aura tout donné.
In fine : Pierrot a véritablement rempli son contrat sur terre….Sans jamais courber l’échine en souffrant en silence du naufrage économique collectif, qui nous affecte tous.
Que ceux qui en doutent encore se ravisent ! Nous ne sommes que poussière ! Et nous retournerons poussière !
A ses douces moitiés Haoua et Fatoumata, à ses dignes héritiers Bachir, Yacine, Malick, Hakim, Adam, Hairati et Youssouf, nous disons courage, puisque Pierrot n’est pas mort, il vit en nous et sa place est au Paradis !
Pour nous autres sursitaires (pour combien de temps encore), je n’ai, une fois de plus, que l’unique formule magique de STENDHAL à proposer : « Puisque la mort est inévitable, oublions-la. »
Repose en paix, grand-frère PIERROT !

Djibril Baré
Ancien du Lycée National (actuel Lycée Issa Korombé)