Hama Amadou n’est plus : Les juges de service et leurs commanditaires face à leur conscience
" Il n'y a point de plus cruelle tyrannie que celle que l'on exerce à l'ombre des lois et avec les couleurs de la justice ". La justice, ce glaive redoutable et rarement mis en cause, sera utilisé pour lui nuire. Convaincus que la loi et la justice offrent ce paravent qui lui permet de poignarder sa victime dans le dos sans risquer de se faire prendre, ceux qui s'étaient fait le serment d'éliminer Hama Amadou de la course à l'élection présidentielle vont mettre en branle la justice.
S'il y a un homme politique nigérien qui a subi un ignoble acharnement judiciaire dans sa vie politique, c'est bien Hama Amadou. Dès 2007, Hama Amadou sera accusé et inculpé par la justice d'être le complice d'auteur (s) non identifié(s) de l'incendie du véhicule d'un certain Moussa Keita. Il va bénéficier d'une liberté provisoire puis enfin d'un nolieu prononcé par le Doyen des juges, le dossier étant vide. En vérité, c'étaient les accusateurs qui ont mis le feu au véhicule, sur instructions de ses gourous politiques. Auparavant, la première tentative d'impliquer Hama Amadou dans un sale dossier était liée à l'affaire MEBA. Des inspecteurs sont commis de trouver la moindre peccadille pour épingler Hama Amadou, mais ne trouveront rien. C'est ainsi qu'est née la sordide idée du véhicule incendié de Moussa Keita.
Passé ce cap qu'il a surmonté sans coup férir, Hama Amadou n'est pas au bout de ses peines judiciaires. C'est une machine qui a été mise en place avec, au coeur de la cabale, les juges Gayakoye Sahabi Abdourahamane et Bouba Mahaman, tous deux proches du PNDS. Il fallait une autre trouvaille. Les bourreaux de Hama Amadou vont trouver quelque chose à lui coller. C'est le fonds d'aide à la presse de l'année 2000, un fonds dormant non encore utilisé à l'époque par défaut d'un Conseil supérieur de la communication (Csc). Utilisé par l'ancien Premier ministre Hama sur instruction de Mamadou Tanja pour entreprendre une offensive de communication au Niger et en France pour vanter les mérites de son gouvernement en si peu de temps, ce fonds d'un montant de 100 millions de francs cfa va être l'alibi trouvé. Malgré les justifications apportées par la victime désignée par procuration de juges de service, Hama Amadou va être formellement inculpé d'avoir détourné les 100 millions de l'aide à la presse à des fins personnelles.
Entendu le 5 août 2007 par la commission d'instruction de la Haute Cour de justice de la République, Hama Amadou va être mis en accusation par l'Assemblée nationale. Ses avocats introduisent une demande de remise en liberté provisoire, sur laquelle les juges devraient statuer dans les dix jours.Cette audition a été vécue comme un soulagement par Hama Amadou, plus que jamais persuadé que les poursuites engagées contre lui relèvent d'une manoeuvre politique visant à l'écarter de la présidentielle de décembre 2009. Selon ses avocats, tout est fait pour le maintenir en détention le plus longtemps possible.
" L'interrogatoire était initialement prévu le 29 juillet, mais le procureur général a prétexté une incompatibilité entre la procédure et un mandat local détenu par l'un d'entre nous, Me Boubacar Mossi, pour obtenir un renvoi. Ce dernier s'est pourtant rapidement retiré pour éviter le blocage ", soutient Me Marc Le Bihan, qui affirme avoir été personnellement victime d'une tentative d'intimidation. " On a voulu exhumer une décision de suspension me concernant, pourtant caduque depuis quatre ans ", explique-t-il. " L'ordonnance de renvoi de l'interrogatoire avait déjà été prise quand Me Mossi s'est retiré ", se défend le procureur général de la Haute Cour.
Une justice instrumentalisée par des juges de service lancés aux trousses de Hama Amadou
Dirigée par Bouba Mahamane, un homme plein de zèle et animé d'une animosité certaine vis-à-vis de Hama Amadou, la Cour de cassation fait le service minimum à la place du gouvernement.Lorsque les Nigériens ont appris la déchéance de Hama Amadou de son statut de député, ils ignorent totalement les connexions liberticides, voire "incestueuses", qui ont été mises en oeuvre pour parvenir à cette supercherie du bureau de l'Assemblée nationale et corroborée par la Cour constitutionnelle à travers son arrêt du 25 mai 2018.
Sur quoi s'est appuyé le parlement nigérien pour délibérer et saisir la Cour constitutionnelle ? La réponse se trouve dans une insolite correspondance de la Cour de cassation au président de l'Assemblée nationale. Dans cette lettre peu conventionnelle archivée sous le numéro 625/G/CCASS et datée du 25 mai 2018, le greffier en chef de la Cour de cassation, maître Ibrahim Dan Hannou, écrit ceci : " J'ai l'honneur de vous transmettre pour toute fin utile l'expédition de l'arrêt n°18-025/ CC/CRIM du 11 avril 2018 rendu par la Chambre criminelle de la Cour de cassation dans l'affaire Oumarou Taweye, Safiatou OrouSabi, Hama Amadou, Saley Ganda, Na-Haoua Mahamadou, Zara Ibrahim et Zeïnabou Djibo contre ministère public ". Une lettre, selon les avertis de la chose, que la Cour de cassation n'aurait jamais dû initier. Revient-il à la Cour de cassation de saisir l'Assemblée nationale pour une suite à donner à ce dossier ? Non, répondent formellement des magistrats consultés et qui avaient souhaité garder l'anonymat.
En juin 2008, il a été arrêté, puis incarcéré durant dix mois. Sa prison fut un véritable enfer. Tout était prévu pour lui rendre la vie impossible. Tout ce qui peut ressembler à " une simple commodité " pour un prisonnier de son rang lui avait été retiré : la télévision, la table à manger et même le réfrigérateur où sont gardés ses produits pharmaceutiques Ses conditions de détention étaient tellement exécrables que sa santé a été gravement affectée. Ce qui a conduit à son transfèrement à l'Hôpital National de Niamey avant d'être nuitamment enlevé et emporté par des éléments des Forces nationales d'intervention et de sécurité (FNIS), dans une ambulance alors qu'il était inconscient.
Acculé jusqu'à la mort, Hama Amadou reste et demeure la proie de chasseurs d'homme sans vergogne
Sorti de cette sordide prison après 10 mois de détention, il part se soigner à l'étranger mais ce qu'il ignorait, c'est que ses bourreaux n'étaient pas près de lâcher prise. L'étau va se resserrer de plus en plus autour de lui. L'affaire du fonds d'aide à la presse n'ayant pas prospéré, les juges de service et leurs commanditaires vont rapidement agiter un nouvel épouvantail. Ainsi, par la bouche du ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement, feu Mohamed Ben Omar, un mandat d'arrêt international sera lancé contre lui, l'accusant notamment de " détenir 15 000 actions dans la banque ouest africaine Ecobank ".De toute évidence, l'objectif de ce sordide combat contre Hama Amadou est de l'arrêter et de le jeter en prison, quel que soit le motif.
Lats but not the least, la chasse à l'homme contre celui que feu Issoufou Bachara déclaré être le meilleur de tous, se poursuivra de plus belle. Les bourreaux ne voulaient laisser le moindre répit à leur proie. Candidat à l'élection présidentielle de 2016, Hama Amadou sera à nouveau mis en joue et inculpé, cette fois-ci, de trafic de bébés. Une affaire sans plaignant au bout de laquelle toutes les procédures et règles de droit ont été escamotées par les juges de service pour rejeter leur coupable désigné en prison. Rentré de son exil en France pour affronter son destin, il sera arrêté et immédiatement transféré à la maison d'arrêt de Filingué où il restera jusqu'à la publication des résultats de l'élection présidentielle à laquelle il était candidat. Déclaré deuxième et donc candidat au second tour, Hama Amadou va être maintenu en prison tandis que son challenger, Issoufou Mahamadou, parade à travers le pays pour battre campagne.
Candidat déclaré à nouveau pour l'élection présidentielle de 2021 face à Bazoum Mohamed, Hama Amadou sera déclaré inéligible par les mêmes juges de service, Bouba Mahaman, le même qui était à la Cour de cassation auparavant, trônant cette fois-ci à la tête de la Cour constitutionnelle. Dans la foulée, Bazoum Mohamed que l'on dit nonnigérien aujourd'hui, a été déclaré éligible par la même Cour constitutionnelle.
Laboukoye (Le Courrier)