La Nigérienne de la semaine : Mme N’Zi Fati Hassane, cadre à l’Agence du NEPAD
Bonjour, pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?
Bonjour, je vous remercie de l’opportunité que vous me donnez de m’exprimer à travers Nigerdiaspora. J’ai hésité à accepter cette interview, mais je suis la première à déplorer le manque de visibilité et d’exposition des femmes africaines et nigériennes en particulier dans les medias. Pour y remédier, nous, femmes nigériennes devons également accepter de nous exposer un peu plus et de partager nos expériences. Et dernièrement en consultant votre site, je suis tombée sur le portrait de Jean-Luc Marcellin que je n’ai pas la chance de connaître par ailleurs, et je ne sais pas pourquoi, mais cette interview m’a encore plus touchée que celles que j’ai l’habitude de lire sur Nigerdiaspora et qui sont toujours très intéressantes. Donc si mon parcours peut retenir l’attention d’autres compatriotes comme moi-même j’ai été inspirée, je pense que cela vaut la peine profiter de vos colonnes pour parler de mon parcours.
Je suis Mme N’Zi Fati Hassane. Je suis originaire de Filingué par mon père, Chikal plus précisément, même si ma famille paternelle s’est installée à Niamey, Zongo il y a quelques générations. Ma mère quant à elle est d’Abalak Tahoua, issue des Kel Aghlal.
Je suis ingénieur statisticienne de formation, également titulaire d’un MBA. J’ai commencé ma carrière professionnelle en Europe au sein de l’un des acteurs majeur du conseil en stratégie et management et je suis actuellement au service de l’agence du NEPAD où j’ai été recrutée il y a bientôt trois ans en tant que Directrice de Cabinet du Secrétaire Exécutif. Je suis également en charge du Programme Compétences et Emploi des Jeunes. Je suis mariée depuis 16 ans et mère de 2 enfants.
Quel a été votre parcours académique ?
Dans mon parcours j’ai eu une chance assez extraordinaire puisque mon père qui était fonctionnaire, a été affecté à l’Ambassade du Niger à Bruxelles à peu près au moment de ma naissance. La famille l’a donc rapidement rejoint et c’est ainsi que j’ai passé mes premières années en Belgique d’abord, au Canada, en France, avant de retourner au Niger à l’adolescence. Mes premières années de scolarité se sont donc déroulées à Ottawa, au Canada, et je pense que c’est l’une des expériences qui a grandement contribué à définir mon rapport au monde et à moi-même. J’y ai acquis une grande soif d’apprendre, et une solide confiance en mes capacités d’agir et d’influencer ma propre trajectoire. Ce sont certainement les outils qui ont par la suite permis mon parcours. Souvent j’aime glisser dans la conversation que j’ai fait le Lycée Kassai et le CEG Lazaret, ce qui est également vrai. Après mon bac C, j’ai intégré la faculté de Sciences Economiques et Juridiques de l’UAMD de Niamey, en sciences économiques. J’avoue que ce choix d’orientation était un choix par défaut, étant donné que pour différentes raisons, je me suis retrouvée sans autre option que l’Université de Niamey à la fin de mon lycée.
Je garde pourtant un très bon souvenir de ces années. Dans mon esprit, une fois à l’université, un étudiant devait aussi avoir un petit boulot pour se prendre en charge et acquérir de l’expérience professionnelle. C’est partant de cette idée que j’ai saisi l’opportunité de suivre un stage de formation à la radio Ténéré, qui a ensuite débouché sur un petit contrat et qui m’a permis de produire et réaliser des émissions sur des sujets culturels et de société. Ce n’était pas évident parce que ce n’était pas très courant à l’époque à la fin des années 90, et mes parents essuyaient souvent des remarques de l’entourage plus ou moins proche qui ne comprenait pas que l’on puisse à la fois étudier et avoir un petit job, surtout en tant que fille. Mais à force de dialogue et se basant sur le rapport de confiance que nous avions, j’ai pu tenir bon et profiter de cette expérience hors du commun, surtout que le journaliste Ibricheick m’a ensuite proposé de l’assister pour une émission à vocation politique. D’ une manière générale, la position de jeune reporter m’a permis de découvrir certains aspects du Niger que je connaissais finalement assez peu, et j’ai beaucoup appris durant cette période auprès de gens comme Souleymane Issa Maiga, Hadj Bachir, Harouna Idé, feu Mallam Yaro, feue Mariama Keita, Moustapha Mamane Sani, Boubacar Diallo et bien d’autres.
En 2000, j’ai entendu parler complètement par hasard de l’ENSEA, une école de statistique très sélective située à Abidjan et qui recrute ses élèves sur concours dans toute l’Afrique francophone. J’ai passé le concours et j’ai été admise, et c’est ainsi que j’ai continué mes études en Côte d’Ivoire où je suis sortie en 2002 ingénieur des travaux statistiques. Au cours de ma dernière année d’études, j’ai passé un concours pour des écoles de commerce en France et j’ai été admise à toutes celles que j’ai présentées sauf la première dans les classements nationaux à l’époque, HEC. Comme je n’avais pas plus d’information, j’ai choisi celle qui suivait dans le classement, et qui était l’ESSEC et je pense que ça a été une grande chance pour moi de « rater HEC », car j’ai découvert par la suite que l’ESSEC était ce qui me convenait le mieux en termes d’état d’esprit.
Tout ça pour dire que j’ai un bac C obtenu au Lycée Kassai de Niamey, un DEUG en économie de l’Université de Niamey, un diplôme d’ingénieur des travaux statistiques de l’ENSEA d’Abidjan et un MBA de l’ESSEC.
Quels sont les facteurs qui vous ont aidé dans votre parcours académique ? Quels sont vos role models ?
Très jeune, j’ai eu une vision de mon futur, et tout au long de mon parcours, j’ai été capable d’évaluer les opportunités au regard de cette vision. Tous mes choix personnels et professionnels se sont faits et se font toujours par rapport à cette idée d’ensemble que j’ai de ce futur. Je pense sincèrement que c’est l’outil le plus puissant que l’on puisse acquérir en termes de développement personnel.
De plus, en tant que femme africaine, le choix de mon conjoint a été plus que déterminant dans mon parcours académique et professionnel, d’autant plus que je l’ai rencontré assez jeune. Je n’insisterais jamais trop sur le fait qu’en tant que femme nigérienne, le support entier, franc et actif d’un époux est une condition indispensable au succès lorsque l’on veut mener de manière harmonieuse vie familiale et carrière professionnelle.
En revanche, je me méfie beaucoup de la notion de « role model ». Je trouve que cela introduit une forme de conformisme. Et à partir du moment où l’on parle de conformisme, on disqualifie les besoins personnels, on menace la créativité individuelle et même collective. Je peux être marquée ou inspirée par une action, une parole, une attitude d’une personne, quelle qu’elle soit, à un moment donné, mais imaginer ma propre trajectoire me paraît beaucoup plus intéressant que d’essayer de me claquer sur une autre personne.
Cela étant dit, je vis l’opportunité de travailler étroitement avec Dr Ibrahim Assane Mayaki comme une chance hors du commun, et sur le plan humain et professionnel j’apprends énormément à ses côtés.
Quel a été votre parcours professionnel ?
Comme mon parcours académique le démontre, j’ai toujours été attirée par les environnements compétitifs, qui sélectionnent les meilleurs et vous obligent à maintenir des standards de qualité élevés dans tout ce que vous faites.
Après mes études de management, j’ai intégré Accenture, un cabinet de conseil américain. A l’époque la firme comptait environ 300.000 personnes à travers le monde et je pense qu’ils sont maintenant à plus de 400.000. J’ai l’habitude de dire que cette expérience m’a vraiment formée en tant que professionnelle. J’avais un rôle classique de consultante en management, qui consistait à participer à des missions de stratégie et d’organisation, auprès d’entreprises et d’organisations des secteurs privés et publics. Concrètement, les clients faisaient appel à nous lorsqu’il y avait une problématique organisationnelle ou stratégique critique à résoudre. Après une analyse et un diagnostic de la situation actuelle, l’équipe de consultants propose différentes options de solutions les plus adaptées et accompagne les dirigeants et les équipes dans la mise en œuvre, le suivi et l’évaluation de la solution retenue. C’est un métier où il faut avoir une bonne culture générale en termes de business et de management, mais également se tenir constamment à jour de ce qui se fait dans les différentes industries.
Il faut dire aussi que ce sont des prestations pour lesquelles les clients paient très cher, donc il faut démontrer tous les jours et pratiquement dès le premier jour que vous apportez de la valeur ajoutée. Il y a un niveau d’exigence dans tout ce qui est fait chaque jour par chaque membre de l’organisation, et qui est mis en avant dès les épreuves de recrutement. Ce n’est pas propre à Accenture, mais à tous les cabinets de conseil international, tels que les Big Four (PwC, Deloitte, KPMG, EY), et bien sûr les McKinsey, Bain et BCG, etc qui sont encore une autre catégorie et plus spécialisés sur la stratégie.
Il y a un autre aspect qui m’a beaucoup plu dans cette expérience, c’est l’esprit de compagnonnage qui règne dans des grands groupes tels qu’Accenture. Vous être très vite mis en situation de gérer des équipes, et parmi vos objectifs vous devez les faire progresser. En même temps, vous bénéficiez évidemment de mentoring de la part de collègues plus expérimentés. C’est un système qui est évidemment au service de l’entreprise et des clients, mais il n’empêche que c’est un très bon moyen d’évoluer du point de vue personnel et managérial.
Tout ça pour dire que pour un jeune diplômé ou une jeune diplômée, sortant d’une très bonne école ou université, et qui souhaite faire ses preuves, avoir une première expérience formatrice et rigoureuse, et se frotter à des brillants esprits venant du monde entier, le conseil dans ce genre de cabinets est une très bonne expérience.
Et pourtant vous avez quitté cette firme ?
Oui, j’avais entendu beaucoup de choses concernant la difficulté à concilier ce genre de métier avec une vie de famille, et en commençant j’avais décidé de que je partirais après mon premier enfant. Paradoxalement, à l’époque où je suis rentrée de congé maternité, je pilotais une prestation de transformation dans un grand groupe bancaire français, et malgré la responsabilité et les déplacements que cela demandait, j’avais réussi à trouver un équilibre entre vie familiale et professionnelle. Je suis du coup restée beaucoup plus longtemps que prévu.
Ce qui m’a emmenée à partir, un peu plus tard, c’est que lorsque vous entrez dans ces organisations, on vous demande dans l’ordre de : 1- délivrer des prestations, 2- faire évoluer vos équipes, et 3- contribuer à l’effort commercial. Plus vous avancez en expérience, plus cet ordre s’inverse et l’une de vos priorités devient de comprendre les besoins de vos clients et prospects et de proposer des missions qui y correspondent. Bien sûr, c’est tout à fait indispensable à la bonne marche des affaires, et c’est quelque chose que je faisais sans problème. Mais c’est quelque chose que je faisais aussi sans plaisir. Donc comme je n’avais pas envie de me développer dans ce sens, j’ai commencé à répondre aux appels des chasseurs de tête. C’est comme ça que je me suis retrouvée dans une entreprise du para public puis une entreprise cotée à la bourse, toujours à Paris, où j’ai eu à piloter des programmes de transformation.
Je dois dire que pendant ces années, il y avait une réflexion qui était en cours dans notre couple. Cela faisait environ 10 ans que nous travaillions en Europe, et mon constat était que dans les milieux où nous évoluions, les compétences que nous avons développées existent en abondance, et les organisations étant matures, évoluant dans des marchés matures, tout ce que nous faisions servait finalement à les rendre plus performantes mais de manière finalement marginale. Quand nous discutions avec nos amis et connaissances qui travaillaient en Afrique, nous comprenions qu’ils faisaient face à des défis beaucoup plus stimulants, étant donné qu’il y a beaucoup de choses à construire. Ce que j’en retenais, c’est que sur le continent africain, il y avait beaucoup plus d’opportunités de mettre nos compétences à contribution pour avoir un réel impact.
C’est dans ce contexte que j’ai appris que le Dr Mayaki, Secrétaire Exécutif de l’Agence du NEPAD cherchait à recruter une personne pour gérer son cabinet. A la lecture de l’annonce publiée sur le site internet du NEPAD, il m’a semblé que mon parcours m’avait permis de développer les compétences et les connaissances nécessaires pour ce poste. C’est un poste technique, et non une nomination politique, donc il y a un processus de recrutement classique avec pré-sélection, entretien écrit, entretien oral devant un panel. A l’époque, ce processus durait assez longtemps donc j’ai eu le temps de me préparer comme pour un concours, avec l’appui moral et matériel et mon époux, le soutien de mes mentors et du coach qui me suivait à l’époque. Les plus jeunes sont surpris lorsque je dis que je suis arrivée à mes entretiens avec en tête une très bonne connaissance du fonctionnement institutionnel du NEPAD, une synthèse personnelle de tous les rapports annuels d’activités, et surtout que j’avais lu et écouté toutes les interviews du Dr Mayaki disponibles dans le domaine public. Pour moi c’est le minimum de préparation exigée pour un poste qu’on souhaite décrocher, et c’est un exercice indispensable qui m’a permis de faire de manière précise le rapprochement entre les défis du poste et du NEPAD d’une part, et mes connaissances et compétences d’autre part.
Comment s’est passée la transition du secteur privé à la diplomatie ?
Ce sont en effet des environnements très différents, et il faut aussi rappeler que je revenais travailler en Afrique après avoir exercé mon métier très majoritairement en Europe. Donc les codes, les leviers d’actions, les enjeux étaient très différents. En revanche, le niveau d’exigence, l’engagement, la nécessité de construire l’adhésion des parties prenants autours d’idées fortes et novatrices, ce qui constitue finalement le moteur de mon éthique de travail était le même. Ce qui m’a aussi facilité la tâche, c’est que bien qu’étant la première femme à ce poste, certains de mes prédécesseurs étaient aussi plutôt jeunes donc je pense que cela a aussi joué dans ma prise de fonction, vis-à-vis de mes interlocuteurs.
C’est une position intéressante parce que telle que je la vois, il s’agit de jouer l’interface entre le dirigeant et « le reste du monde ». En clair, il faut s’assurer que tous les sujets concernant l’organisation, les parties prenantes, les partenaires… qui méritent son attention lui parviennent, mais analysés et synthétisés de manière à lui permettre de prendre les meilleures décisions possibles. D’un autre côté, il faut lui éviter d’être submergé par des questions qui n’ont pas de pertinence à son niveau donc essayer de les résoudre ou de les faire résoudre par d’autres selon le niveau d’autorité. Donc c’est passionnant, mais c’est une mission au service de la mission du dirigeant. Il n’y a pas de périmètre significatif rattaché à ce genre de poste, et le cahier des charges peut très grossièrement se résumer à « faciliter le travail du dirigeant ».
C’est aussi pour cette raison que lorsque l’Agence du NEPAD m’a proposé de prendre en charge l’un des quatre programmes, le résultat de ma réflexion a été d’accepter. Il faut savoir que toutes les activités menées par le NEPAD sont organisées autour de quatre programmes, qui permettent de mettre en œuvre des initiatives qui répondent aux ambitions de l’Agenda 2063 :
- Industrialisation, Sciences, Technologie et Innovation ;
- Gouvernance des Ressources Naturelles et Sécurité Alimentaire ;
- Intégration Régionale, Infrastructure et Commerce et
- Compétences et Emploi des Jeunes dont je m’occupe.
Cela fait écho à vos activités associatives.
Oui, tout à fait ! J’ai toujours été intéressée par les questions de formation, d’éducation, surtout vu sous le prisme de l’égalité des chances. Lorsque j’étais chez Accenture, j’étais la référente d’un programme appelé « Pourquoi Pas Moi ? », initié par l’ESSEC, et qui vise à permettre aux jeunes lycéens issus des quartiers français défavorisés, d’avoir un meilleur accès aux Grandes Ecoles, à travers des sessions de développement personnel, des sorties culturelles, des sessions de sensibilisation et d’orientation. Les entreprises telles qu’Accenture acceptent également d’organiser des rencontres entre leurs cadres et les lycéens, pour qu’ils puissent comprendre le métier et se faire une meilleure idée de ce qu’ils pourront faire plus tard. On en revient à la question de vision.
Donc, chez Accenture, j’étais la référente de ce programme, et en transposant l’expérience au Niger, j’ai voulu toucher un maximum de jeunes. Avec quelques Nigériens et Nigériennes, nous avons créé Ose-Niger (Organisation pour le Soutien à l’Education) qui vise à sensibiliser les jeunes lycéens, lycéennes, étudiants et étudiantes, sur la construction d’un projet de formation, les opportunités de formation et de financement. Nous organisons des rencontres entre jeunes et cadres issus des formations dont nous faisons la promotion et nous documentons toutes nos informations sur un site internet (www.ose-niger.org) En plus de l’équipe nigérienne, nous travaillons avec un grand nombre de volontaires en ligne des Nations-Unies.
Malheureusement, depuis l’obtention de notre récépissé, nous n’avons pas réussi à obtenir notre agrément, qui nous aiderait à mener des activités de grande envergure, notamment envers la jeunesse de l’intérieur du pays. Donc si vous le permettez, je profite de l’occasion pour lancer un appel aux autorités compétences pour qu’une attention soit portée à ce dossier.
On voit que vous êtes plutôt active sur les réseaux sociaux. Est-ce que ce n’est pas incompatible avec votre statut de diplomate ?
Non, pas du tout, j’ai envie de dire même « au contraire ! ».
Les instances de gouvernance du NEPAD nous rappellent régulièrement le besoin de mieux communiquer sur nos activités. Il y a bien entendu beaucoup d’efforts qui sont faits au niveau de l’Agence du NEPAD, mais je considère que chaque personne qui y travaille est un ambassadeur potentiel. Donc notre entourage, nos réseaux doivent être informés de nos activités. C’est la raison pour laquelle je publie régulièrement des informations sur les activités de mon programme et de ceux de mes collègues.
Il m’arrive également d’exprimer des opinions assez fortes sur des concepts qui me paraissent importants quant à la trajectoire de développement du continent. En tant que diplomate de l’Union Africaine nous avons des textes adoptés par les Chefs d’Etat et de Gouvernement qui préservent les personnels de toute discrimination basée sur les opinions. Donc la liberté de conscience et la liberté d’expression sont des valeurs cardinales au sein de l’organisation.
Il y a bien entendu des choses qui sont interdites, comme se présenter à des élections sans avoir démissionné de son poste de fonctionnaire de l’UA, ou exprimer des idées qui soient contraires aux valeurs ou aux positions de l’Union Africaine. Et comme d’une part je n’ai aucune intention de me lancer en politique et d’autre part, mes idées et convictions sont en phase avec celles de l’UA, je m’exprime dans un cadre très confortable.
Ce qui peut surprendre un œil non averti, c’est peut-être qu’on assiste à l’émergence d’une nouvelle vague de diplomates de l’UA, avec des individus venant de secteurs divers, plus connectées, plus habituées à partager de manière plus large leurs activités et leurs opinions. Même nos dirigeants ont appris à s’exprimer de manière beaucoup plus régulière, et c’est pour moi une bonne chose, car cela donne du corps à notre image, cela permet de rappeler que derrière les politiques publiques dont nous faisons la promotion, derrière les programmes et les projets que nous mettons en œuvre, il y a avant tout des femmes et des hommes qui sont portés par un idéal, idéal qui peut s’exprimer de plusieurs manières mais qui revient toujours à celui de faire émerger l’Afrique que nous voulons.
Pour le mot de la fin, lorsque vous faites la rétrospective de votre parcours, quel rôle a joué le Niger selon vous ?
J’aimerais pouvoir répondre de manière aussi tranchée que mes prédécesseurs dans cette rubrique.
Ce que je peux dire, c’est qu’enfants, nous avons reçu une éducation nigérienne, et ce malgré le fait que nous avons grandi entre la Belgique, le Canada et la France. C’est l’occasion de rendre un hommage à notre défunt père et à notre mère, parce qu’étant dans leur situation d’expatriation aujourd’hui, je réalise le défi que cela représente. Cette éducation nigérienne a bien entendu fortement influencé mon rapport au monde et mon parcours.
A un autre niveau, le constat que je peux faire, c’est que compte tenu des ambitions que j’avais pour moi-même, et de ma volonté de faire bouger les lignes, la majorité des obstacles que j’ai rencontrés étaient liés au fait d’être une femme nigérienne. D’un autre côté une grande partie des opportunités, des rencontres, de l’aide dont j’ai bénéficié, auraient été difficilement possibles ailleurs que dans notre contexte socio-culturel. Il y a chez les Nigériennes et les Nigériens une facilité à établir les contacts, à se soutenir mutuellement sur la base de centre d’intérêts communs, finalement à se comporter comme une seule et même grande famille et c’est un trait de culture que nous pouvons utiliser à bon escient.
Donc je m’interroge plutôt sur la manière dont je peux servir mon continent, comment cette expérience de femme noire, africaine, nigérienne, ma culture et le parcours personnel que j’ai eu, peut contribuer à apporter une autre perspective et à façonner des solutions aux défis que rencontrent les Etats membres de l’UA. C’est un sujet qui me semble concret et qui aujourd’hui cristallise beaucoup plus mon attention et mon énergie.
Je m’arrête là et vous remercie encore une fois de votre intérêt et de votre patience. J’espère que vos lecteurs et surtout vos lectrices auront trouvé un intérêt dans nos échanges. Je souhaite longue vie à cette rubrique et je me réjouis d’avance de lire d’autres portraits de Nigériennes et Nigériens de la semaine sur Nigerdiaspora.
Mme N’Zi Fati Hassane
https://twitter.com/FatiHassane
Réalisée par Boubacar Guédé
04 janvier 2019
Source : http://Nigerdiaspora.Net