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Le Nigérien de la semaine : M. Garba Illou Abdoul Kadri

Comment souhaitez-vous vous présenter aux internautes de Nigerdiaspora ?

Je vous ai rencontré (Coordinateur de Nigerdiaspora) pour la première fois à l’aéroport de Bruxelles en 2012, quand je revenais d’Afghanistan et nous avons beaucoup échangé sur mon parcours. Vous m’aviez dit avoir peut-être trouvé un candidat pour votre rubrique « le Nigérien de la semaine ». Je n’étais pas enthousiaste à cette idée. Deux années après notre première rencontre, nous nous sommes croisés encore à Bruxelles, à la Gare de Midi autour d’une tasse de café, mais j’étais toujours réticent. Aujourd’hui, ma position a évolué, car j’estime que nos jeunes sœurs et frères ont besoin d’entendre des témoignages qui peuvent les aider à prendre des décisions sur leur plan de carrière. Je trouve en effet qu’il n’y a pas assez de cadres d’échanges entre professionnels et étudiants.

Je suis Monsieur Garba Illou Abdoul Kadri. Agé de 43 ans, je suis marié et père de 3 enfants. Nombreuses sont ces personnes qui m’appellent Kader. Je suis comptable de formation, mais je me suis réorienté vers la coordination de mission humanitaire. Je suis actuellement en fonction en République Démocratique du Congo, précisément dans la province du Tanganyika, dans la ville de Kalemie en tant que Chef de Bureau de l’ONG Américaine Catholic Relief Services.

Quel a été votre parcours académique ?

Stage pratique lors de mon master humanitaire à Bioforce, le scenario est d'identifier un site pour installer un camp de réfugiés, novembre 2008

J’ai commencé l’école primaire dans mon village à Goudel, puis le collègue au CEG 14 Goudel situé à Kouara Kano, plus tard rebaptisé CES ZAM (Zam est un descendant de Tagour, l’ancêtre des zarmas de Dosso et de la vallée du fleuve Liboré, Goudel, Ndounga…). Après mon BEPC au complexe Fogasso de Maradi (Première promotion), j’ai été orienté au Lycée Issa Beri de Niamey dans la section comptabilité-informatique. Trois années après, je suis sorti avec le Diplôme d’Aptitude Professionnelle et nous étions systématiquement versés dans le monde du travail (août 2000). Je suis également titulaire d’un Master en Gestion financière obtenu en Belgique. En 2008, après un concours international organisé au Burkina Faso, j’ai obtenu une bourse d’études pour intégrer l’Institut Bioforce, Lyon en France. Cet institut est la référence en Europe dans le domaine de la formation des travailleurs humanitaires. Je suis de la promotion Bioforce 2008, sanctionné par un diplôme appelé Administrateur de la Solidarité Internationale (équivalant au Master). C’est sans doute cette formation qui a boosté ma carrière professionnelle.

Je ne vais pas donner l’impression à vos lectrices et lecteurs que mon parcours académique était brillant. Comme beaucoup de jeunes de ma génération, nous étions exposés aux grèves et années blanches au début des années 90, durant tout notre cursus au collège. Ces perturbations ont fortement joué sur ma concentration et mon engagement. Par conséquent, j’ai connu des contre-performances avec des redoublements.  Les enseignements que j’en tire est que le plus important n’est pas l’échec, mais les leçons apprises.  Comme vous avez pu le constater, mon parcours académique est plutôt modeste, à la différence de quelques universitaires émérites qui m’ont précédé sur cette plateforme comme Nigérien de la semaine.

Qu'est-ce qui vous a poussé vers l’humanitaire ?

Au début des années 2000, il n’y avait pas un gap important entre l’offre et la demande de travail, du moins pour les diplômés des écoles professionnelles. Les diplômés de ces écoles arrivaient à s’insérer sans grande difficulté dans la vie professionnelle. Je me rappelle que c’étaient les entreprises qui demandaient à notre école d’envoyer des stagiaires ; des stages qui souvent aboutissaient à des contrats de travail. J’ai été envoyé en stage au BALD (Bureau d’Animation et de Liaison pour le Développement), un projet lié à l’évêché de Niamey. C’est là que j’ai effectué mes premiers pas dans le domaine du social et du développement.

Lors de la visite de notre projet à l’hôtel général de référence, Territoire de Lubutu, Province du Maniema, RDCongo, mars 2010

L’élément qui m’a frappé et poussé à diriger ma carrière vers l’humanitaire est le constat fait durant la crise alimentaire et nutritionnelle de 2005 au Niger. J’ai vu comment les humanitaires de l’ONG Médecins Sans Frontières bravaient les pistes entre Maradi et Dakoro (c’était une piste sablonneuse) pour aller soigner des centaines d’enfants malnutris. J’ai eu la chance de visiter leur centre de récupération des enfants (CRENI) de Dakoro. Je ne m’étais jamais rendu compte qu’il y avait une situation de détresse au Niger avant de visiter ce centre. J’ai vu des enfants avec des corps déformés par la malnutrition aigüe. C’était choquant et difficile de contenir les larmes. Les jeunes nigériens et les expatriés très engagés travaillaient avec dévouement pour sauver ces enfants.             Ils portaient des T-shirts estampillés d’un logo MSF et leurs véhicules avec des grands drapeaux rouges. Les soins étaient gratuits.

 

J’ai été fasciné par le climat de travail multiculturel, leur rigueur et surtout leur jeunesse. C’était beau et c’était le déclic. Depuis lors, j’ai réorienté mon projet professionnel vers l’humanitaire d’urgence. Quatre années après, je me suis retrouvé au siège de Médecins Sans Frontières à Bruxelles pour signer mon contrat me déployant à Kisangani en République Démocratique du Congo pour appuyer les projets de prise en charge sanitaire et psychologique dans le nord du pays (Niangara et Faraje). Cette zone a été touchée par les exactions de la rébellion ougandaise des RLA (Lord's Resistance Army, du très sanguinaire Joseph Kony) en novembre 2009.

Parlez-nous de vos expériences professionnelles nationales et internationales. Quels enseignements en tirez-vous ?

Au Niger, après mon stage au projet BALD de Niamey, j’ai accumulé des expériences de stage dans les services financiers des ONG « Aide et Action » et le « Centre Médical et Sanitaire – Cermes » de Niamey (2001-2002). J’étais relativement jeune, mes collègues m’appelaient affectueusement « Petit Kader ». Ils m’ont énormément appris sur le métier de la comptabilité, la vie professionnelle et la responsabilité. Je suis toujours reconnaissant envers eux. C’étaient des périodes d’apprentissage qui m’ont beaucoup forgé personnellement et formé professionnellement. De 2003 à 2008, j’ai travaillé à Niamey comme responsable financier à Vétérinaires Sans Frontières, puis Islamic Relief.

Au niveau international, durant mes études à Lyon de 2008 à 2009 et dans le cadre de mon Master en humanitaire, j’ai œuvré dans le milieu social pour une association locale dans le quartier des Minguettes (commune de Vénissieux, France). J’ai également travaillé au siège d’Action Contre la Faim à Paris, où j’ai effectué l’essai du logiciel de comptabilité dénommé SAGA que l’ONG avait souhaité acheter. J’ai aussi travaillé à Lyon pour une firme privée dans la recherche de financement au profit du Fond Mondial pour la Nature (WWF). En novembre 2009, j’ai décidé de rompre mon contrat avec cette firme pour retourner vers ma vocation et mon projet professionnel : « l’humanitaire d’urgence ». J’ai donc quitté la France pour l’Afrique. Mon superviseur m’a dit : « Je n’ai jamais vu un jeune africain qui rompt son contrat en France pour retourner au bled ».

Non loin de Boni, cercle de Douentza, Mali, octobre 2013. Les montagnes de la main de Fatima.

C’est alors que, j’ai intégré Médecins Sans Frontières pour une mission humanitaire en République Démocratique du Congo. Avec cette organisation, j’ai travaillé en portant plusieurs casquettes (Responsable Financier, Chef de Bureau, Coordinateur de projet…) en République Démocratique du Congo (Kisangani), Pakistan, Afghanistan, Mali, République Démocratique du Congo (Equateur), Guinée-Conakry. J’ai également travaillé au Liberia avec l’ONG WAHA International sur un financement de l’USAID dans le cadre de la lutte contre Ébola. C’était une expérience enrichissante, car je me suis retrouvé avec cinq compatriotes nigériens dont quatre sont de la même promotion de Issa-Beri (1997-2000). Nous avons bien représenté le Niger grâce à notre expérience, notre intégrité et notre engagement. Nous étions de plusieurs nationalités, notamment africaines, asiatiques et européennes, avec le leadership nigérien.

J’ai apporté mon expertise à UNICEF Niger (2011) et PAM Niger (2013) en tant que consultant indépendant dans l’amélioration de la qualité de leurs services des approvisionnements. En juin 2015, j’ai eu le désir de retourner me ressourcer au Niger, pour acquérir d’autres expériences, mais également partager le mien et pour garder le lien avec mon cher pays. J’ai donc intégré Catholics Relief Services comme Chef de Bureau à Maradi. J’ai eu l’opportunité d’aller au plus près de nos parents du village dans les départements de Mayahi (Maradi) et Matameye (Zinder). Cette expérience m’a revigoré et permis de comprendre les enjeux du développement dans notre pays. Le succès de notre projet a certainement facilité mon recrutement en République Démocratique du Congo, car notre organisation devrait commencer le même type de programme. C’est ainsi que j’ai été transféré en février 2017 pour la troisième reprise dans ce grand pays d’Afrique (République Démocratique du Congo) comme Directeur Adjoint du Programme pour les volets des opérations (finance, administration, ressources humaines, logistique et conformité). Depuis septembre 2020, j’ai été affecté comme Chef de Bureau de la province du Tanganyika, avec la même organisation.

Parallèlement à mes obligations professionnelles, je travaille dans le freelance (consultant indépendant). Je suis un passionné de Microsoft Excel. Depuis juillet 2011, j’ai créé le cabinet Field Consulting Niger. J’ai facilité 36 sessions de formation en Excel (niveau intermédiaire et avancé) en renforçant les capacités de plus de 350 professionnels humanitaires au Niger, au Burkina Faso et ailleurs (https://www.field-consult.com/). J’ai appuyé une dizaine d’organisations humanitaires dans le renforcement de leurs outils de gestion et dans la création des programmes sur Excel.

Parlez-nous des difficultés et éléments facilitateurs rencontrés en tant qu’acteur humanitaire.

Comme beaucoup d’humanitaires, la principale difficulté est l’éloignement, l’effet de ce qu’on appelle « le mal du pays ». Nous sommes  souvent loin de nos pays, famille et amis. Ce facteur est très pesant sur les humanitaires et cela les pousse souvent à retourner prématurément dans leur pays d’origine. Les conditions de travail, les lieux d’affectation, les contextes ne sont pas souvent adaptés pour une affectation avec la famille, car nous changeons de pays assez souvent.

Photo de famille à l’issue d’une réunion de crise avec les leaders communautaire, Dardai, au Pakistan, janvier 2011

Il y a aussi le côté sécuritaire. Nous travaillons parfois dans des contextes des troubles politiques, conflits intercommunautaires, contextes de terrorisme, guerres ou catastrophes naturelles. En 2012 par exemple, en Afghanistan (Ville de Khost, frontière Afghanistan-Pakistan), nous avons été victimes de plusieurs incidents sécuritaires dont le plus grave était un attentat à la bombe contre notre hôpital. La bombe avait explosé à quelques mètres de mon bureau. Heureusement, les dégâts étaient légers, car c’était juste une « action d’avertissement ». Après cet énième incident, Médecins Sans Frontières a décidé de suspendre ses activités dans cette zone durant 9 mois. C’étaient des moments de stress difficiles.

Aussi, la complexité du contexte de travail, le peu de confort, les crépitements d’armes à feu, les négociations compliquées avec des groupes armés pour obtenir des couloirs de passage, les discussions difficiles avec des autorités civiles et militaires, les attaques des convois, les enlèvements, les meurtres, la confrontation à des situations misérables, la charge du travail sont des sources de stress parfois difficiles à surmonter. Il n’est pas rare de voir des humanitaires en burn-out (surmenage).

Il y a cependant des facteurs facilitateurs qui permettent d’avoir de l’équilibre entre la vie professionnelle et la vie familiale, notamment avec les congés fréquents à des intervalles de temps courts qui s’appellent Repos et Récupérations (R&R). À cela s’ajoutent l’amour du travail et la satisfaction des personnes vulnérables qui bénéficient de nos actions. Nous recevons des témoignages positifs et nous sommes acteurs des changements et de l’amélioration des conditions de vie des personnes qui se retrouvent, dans certains cas, dans des situations de vulnérabilité extrême.

Quel rôle a joué le Niger dans votre parcours ?

Mon pays, le Niger m’a tout donné. J’ai étudié gratuitement à l’école publique et toutes les conditions étaient réunies (salles de classe ventilées, salles informatiques climatisées, bibliothèque, dispensaire, équipements de sport et des terrains de jeux, salles des machines et travaux pratiques, etc.). En plus, j’ai eu le privilège d’être bénéficiaire de la bourse d’État durant trois années. Cette bourse (20.000 Fcfa par mois, environ 40 USD) m’a beaucoup aidé durant ma période du lycée Issa-Beri, où nous avons bénéficié d’un enseignement de grande qualité. La rigueur était de taille et les professeurs venaient pour la majorité du milieu professionnel.

Lorsque je raconte à mes collègues de l’étranger que mes parents n’ont jamais payé mes frais de scolarité et que l’État du Niger me donnait même de l’argent de poche, les stylos, les cahiers, les livres…, ils trouvent cela étrange, car ces avantages n’existent pas partout. C’est donc un avantage que l’État doit maintenir pour les prochaines générations, malgré les difficultés du pays. C’est maintenant à mon tour de renvoyer l’ascenseur à mon pays, celui de respecter ses lois et règlements, d’être un citoyen responsable et civique, de m’acquitter de mes impôts et taxes, de m’engager dans le social localement à travers des actions de solidarité locale. À ce sujet, je suis membre actif de la diaspora des Nigériens des pays des grands lacs (Congo-Brazzaville, Congo-Kinshasa, Burundi, etc.), nous avons apporté notre appui lors des inondations d’août 2020. Je suis également Secrétaire Général de l’amical de la diaspora de Goudel. Nous avons beaucoup de projets communautaires.

Zorzor au Liberia, janvier 2015

Quelles valeurs vous ont guidé ?

La principale valeur est la ténacité, le fait de ne pas s’arrêter au premier obstacle, car des obstacles, j’en ai connus. Rien n’est facile. Rien n’est facile, il faut se battre continuellement pour la réalisation de son projet professionnel. Même au niveau international, la vie n’est pas rose. Il faut se frayer une place par le travail. Dans ce milieu, seule la compétence compte. La concurrence est rude et universelle avec la rencontre de tous les professionnels du monde entier. Les appels à candidatures sont internationaux. À titre illustratif, en Afghanistan, nous étions plus de 17 expatriés sur une base. J’étais le seul Africain. Je représentais non seulement le Niger, mais aussi l’Afrique. La majorité de mes collègues n’avaient jamais été aussi proches d’un africain. Ils me posaient beaucoup de questions sur l’Afrique et le Niger. Lors de nos moments de détente, je projetais sur écran géant des photos de notre beau désert, ainsi que le mode de vie nomade pour leur faire découvrir le Niger et ses merveilles.

J’ai beaucoup cultivé des valeurs universelles, telles que la tolérance religieuse et ethnique, la cohésion sociale, le vivre-ensemble pacifiquement, l’acceptation de l’autre quelles que soient nos différences. Le Niger en particulier et le monde en général ont besoin de ces valeurs de tolérance pour notre paix sociale, gage de notre prospérité. Chez moi par exemple, avec ma femme et mes enfants, nous parlons simultanément le Zarma et le Haoussa. Ceux qui viennent chez moi trouvent que c’est beau. Dans mon travail avec Catholic Relief Services, je collabore avec les prêtres et les évêques catholiques, malgré nos différences dans la confession religieuse et nous avons de très bonnes relations.

Que pensez-vous de la situation humanitaire au Niger et dans la sous-région ?

Elle est complexe. Le Niger est devenu l’un des terrains humanitaires majeurs à cause des multiples foyers de terroristes qui l’entourent. Dans les huit régions du pays, les organisations humanitaires nationales et internationales, les agences des nations unies font un travail remarquable à côté des services décentralisés de l’État. C’est le moment de remercier tous les confrères humanitaires qui travaillent parfois au Niger dans des contextes difficiles. Je voudrais aussi remercier les partenaires techniques et financiers, notamment l’Union Européenne et le peuple américain (USAID) pour leurs générosités. Le contexte du Sahel est compliqué, mais l’espoir est permis. L’union sacrée des pays africains est nécessaire pour arriver à bout de ces terroristes et des bandits de grand chemin.

Avez-vous des solutions, projets, plans pour le développement ou l’humanitaire au Niger ?

Le secteur de l’humanitaire au niveau national demande des moyens et de l’expertise. Je suis content de voir que des ONG nationales sont arrivées à des niveaux de professionnalisme à l’image de leurs consœurs européennes. C’est un bon signe pour la société civile nigérienne. À mon humble avis, en plus de la sécurité et de l’éducation, le secteur de l’agriculture doit être l’une des priorités nationales.

Au niveau local, les jeunes peuvent s’organiser pour apporter un changement dans leurs cités.  À Goudel, par exemple, nous avons des associations qui sont très actives proposant des programmes adaptés à la situation actuelle du pays. Avec très peu ou pas de moyens financiers, elles arrivent à poser des actes de développement. En collaboration avec les associations Tchebero et Gine Koyan Hiyo, notre amical de la diaspora apporte un début de solution aux problèmes de la cité. Je citerai entre autres activités : sensibilisation des jeunes sur la citoyenneté responsable, sensibilisation des jeunes durant les périodes électorales pour des élections apaisées, sensibilisation des jeunes sur les dangers de la drogue, des actions de plaidoyer pour l’emploi des jeunes et la réduction du chômage, des actions de médiation et de bons offices en cas de conflit, la gestion pacifique des conflits, des journées de salubrité publique, des matinées sportives, des concours scolaires avec des prix de la diaspora pour motiver les jeunes à aller vers l’excellence, des cours de vacance et de soutien scolaire, des sessions d’orientation professionnelle pour les jeunes, des actions de sensibilisation citoyenne et bien d’autres.

Ces genres d’initiatives peuvent aider nos quartiers, nos villages et les villes pour que les jeunes prennent en charge leur propre développement et pour éviter leur instrumentalisation. L’État ne peut pas tout faire, car tout est prioritaire dans notre pays. Les jeunes qui sont au pays et leurs diasporas peuvent collaborer pour apporter des changements positifs dans la gestion de leurs cités. Ces genres d’initiatives sont un franc succès au Mali, où des hôpitaux et des écoles sont entièrement construits et équipés par la diaspora en partenariat avec les associations locales.

C’est aussi le lieu de faire un plaidoyer auprès des bonnes volontés pour le financement de notre projet-phare « La maison du scolaire ». C’est un projet ambitieux qui, à l’image d’un Centre Culturel Français, va être le lieu d’échanges, du donner et du recevoir pour des élèves de Goudel et environnants. Coût estimatif du projet : 250 millions de Fcfa. La mairie nous a déjà attribué le terrain, nous cherchons le financement pour la concrétisation du projet.

Avec des collègues, à Swat, Pakistan, 2011

Enfin, pour répondre à votre question, ma proposition est que les jeunes prennent en charge le développement de leurs cités. C’est possible, car à Goudel, nous sommes sur une bonne lancée avec l’appui des collectivités, notamment la mairie de la commune 1 et l’hôtel de ville, un bel exemple de collaboration. 

Quels conseils donneriez-vous aux jeunes nigériennes et nigériens qui voient en vous un modèle ?

Je ne me considère pas comme un modèle. Loin de là, je partage seulement mon expérience avec vous.  Pour les jeunes qui sont intéressés à travailler dans l’humanitaire, je leur conseille de se former dans les écoles spécialisées en la matière. L’humanitaire est devenu un milieu exigeant et rigoureux. La concurrence est tellement rude qu’il devient de plus en plus difficile aux jeunes de trouver même un stage de fin d’études dans les ONG et organisations internationales. Pour chaque recrutement, les ONG reçoivent de centaines de candidatures. Pour donner un exemple, pour un poste d’assistant administratif et financier à Niamey, parfois plus de 200 CV sont reçus. Pour sortir du lot et être appelé pour le test pratique, il faudra se démarquer avec d’autres atouts supplémentaires. En plus de l’expérience et du diplôme exigés, la connaissance de la langue anglaise et la maîtrise des outils bureautiques sont des atouts. Aussi, je conseille mes jeunes sœurs et frères d’accepter de commencer au bas de l’échelle, si c’est cette opportunité qui s’est présentée (d’accepter de jouer les petits rôles). On peut commencer au niveau subalterne ; grâce aux efforts et aux résultats, on peut grimper en hiérarchie. J’ai déjà vu un magasinier devenir chef de projet quelques années plus tard, un chauffeur devenir logisticien au niveau régional, ou un enquêteur devenir Représentant Résident. Il y a beaucoup d’exemples de ce genre. Mais pour y arriver, il faut de l’intégrité, car elle est le maître-mot pour réussir sa carrière dans les organisations internationales et ONG internationales. Le concept de l’intégrité est arrivé à une plénitude qui traduit une tolérance zéro pour les cas de fraudes, de trafics, d’abus et sur les questions de protection des personnes vulnérables.

Goudel, lors de la réception d'un hangar devant le cimetière financé par la diaspora, janvier 2021

Les jeunes ont plusieurs opportunités d’apprentissage. De nos jours, la connaissance est à portée de main. Tout est disponible sur le smartphone. Auparavant, nous étions abonnés au Centre Culturel Franco-Nigérien pour accéder à la documentation. Aujourd’hui, l’essentiel de la connaissance mondiale est en ligne. On peut être tranquillement assis dans une fada et suivre un cours en ligne, participer à une conférence internationale gratuitement, s’améliorer dans sa discipline et apprendre. Je conseille à nos jeunes frères et sœurs de bien utiliser leur temps libre dans l’autoapprentissage.  On peut apprendre avec son smartphone n’importe où, à n’importe quel moment. C’est une opportunité qu’il faut saisir.

 

Kalemie, RDCongo, décembre 2020

Je vous laisse le mot de fin.

Je vous remercie de m’avoir donné l’opportunité de partager mon expérience avec vous. Vous êtes pionniers de l’information en ligne au Niger. Votre journal est une de nos sources principales d’information du pays, bien avant l’avènement des réseaux sociaux. Durant les processus électoraux de 2010 à 2011, vous avez été l’une de nos principales liaisons entre le Niger et la diaspora. Je vous souhaite plein succès.

Monsieur Garba illou Abdoul Kadri.

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Réalisée par Boubacar Guédé
22 juin 2021
Source : https://www.nigerdiaspora.com