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Interview du Médiateur de la République : «Le Médiateur a pour vocation de consolider et de renforcer l’Etat de droit et la bonne gouvernance», déclare M. Diabiri Assimiou

Vous venez d’être nommé Médiateur de la République pour un mandat de six (6) ans. Pouvez-vous nous rappeler le rôle du Médiateur de la République dans un pays comme le nôtre ?

Le Médiateur de la République est une Institution de veille démocratique créée pour la première fois en 1990 sous l’appellation «Médiateur National». Dissoute après la Conférence Nationale, l’institution a été réhabilitée en 2008 sous l’appellation «Médiateur de la République». Elle a été suspendue en 2010 suite au coup d’Etat militaire du 18 février 2010, avant d’être réinstaurée le 08 août 2011 avec l’adoption et la promulgation de la  Loi N°2011-018/PRN du 08 août 2011.

L’intérêt et l’importance de cette Institution résident dans sa principale mission de médiation entre le citoyen et la puissance publique. En effet, l’institution du Médiateur de la République est une Autorité Administrative Indépendante chargée de la médiation institutionnelle, c’est-à-dire la réparation des torts causés aux citoyens par les pouvoirs publics et la réconciliation de ceux-ci avec l’administration incriminée. La médiation institutionnelle est un baromètre qui permet de mesurer le niveau d’acceptation, par tous, des règles du jeu démocratique et le degré de satisfaction des citoyens par rapport à la manière dont ils sont gouvernés à travers les actes et faits administratifs.

Ainsi, le Médiateur de la République reçoit dans les conditions fixées par la loi, les réclamations concernant le fonctionnement des administrations de l’Etat, des collectivités locales, des établissements publics et organismes investis d’une mission de service public, dans leurs rapports avec les usagers. Le Médiateur de la République peut être saisi des questions de la défense des droits de l’enfant et des personnes vulnérables. Il incite les services publics à rechercher l’esprit des lois dans l’application des textes et à accepter de prendre en compte l’équité dans leurs relations avec les citoyens. Il contribue, par ses propositions de simplification administrative ou de réforme à la modernisation des services publics. Le Médiateur de la République peut, à la demande du Président de la République, de l’Assemblée nationale ou du Gouvernement, participer à toute action tendant à l’amélioration du service public ou toute action de conciliation entre l’administration publique et les forces sociales et professionnelles. Enfin, il est  chargé de la défense du droit d’accès à l’information publique.

De quels pouvoirs le Médiateur est-il pourvu pour mener à bien sa mission ?

L’efficacité des interventions du Médiateur est accrue par un pouvoir exceptionnel de contrainte qui lui est reconnu dans deux cas : lorsqu’il s’agit de mettre un terme au comportement manifestement fautif d’un agent ou lorsqu’il convient de mettre fin à l’attitude inacceptable d’un organisme public qui refuse d’exécuter une décision de justice. Dans le premier cas, un pouvoir de substitution est reconnu au Médiateur si l’autorité compétente se refuse à sanctionner un agent indélicat, en lieu et place il peut engager contre cet agent une procédure disciplinaire ou, le cas échéant, saisir d’une plainte la juridiction répressive. Dans le second cas, le Médiateur dispose d’un pouvoir d’injonction. Il peut en cas d’inexécution d’une décision de justice devenue définitive, enjoindre à l’organisme mis en cause de s’y conformer dans un délai qu’il fixe. Si cette injonction n’est pas suivie d’effet, l’inexécution de la décision de justice fait l’objet d’un rapport à titre de compte rendu.

Le commun des Nigériens s’interroge sur le mode d’accès à l’institution du Médiateur. Comment se fait la saisine du Médiateur de la République ?

La loi a énoncé limitativement ceux qui peuvent saisir le Médiateur de la République. Ainsi, sont habilitées à saisir le Médiateur de la République, les personnes physiques ou morales de quelque nationalité qu’elles soient, victimes d’un dysfonctionnement d’une administration de l’Etat, d’une collectivité locale, d’un établissement public ou d’un organisme investi d’une mission de service public.

Par ailleurs, le Président de la République, le Premier ministre, les Députés, les Présidents des Conseils Régionaux et Communaux et les Médiateurs des autres pays peuvent transmettre au Médiateur de la République les réclamations dont ils sont saisis par les citoyens. Quant aux ONG et associations, elles peuvent saisir le Médiateur de la République d’une réclamation, notamment pour les questions des droits des enfants et des personnes vulnérables.

Le Président de la République, l’Assemblée nationale et le Gouvernement peuvent directement saisir le Médiateur de la République pour demander une conciliation ou l’amélioration d’un service public. Enfin, le Médiateur de la République peut se saisir (autosaisine) des situations dont il a connaissance et qui relèvent de sa compétence, chaque fois qu’il a des motifs raisonnables de croire qu’une personne a été anormalement lésée ou peut vraisemblablement l’être par acte  ou omission d’un organisme public.

Toutefois, la loi prévoit que le Médiateur soit saisi par écrit. La saisine est subordonnée à un recours gracieux préalable adressé à l’administration incriminée. Le Médiateur de la République peut être saisi le même jour où le réclamant a introduit son recours gracieux auprès de l’administration mise en cause. Sont joints à la lettre de saisine du Médiateur de la République tous les documents entrant dans le cadre de l’affaire en question. Compte tenu du taux élevé de l’illettrisme au Niger, le Médiateur reçoit les réclamants pour les écouter, les aider à formuler et à écrire leurs réclamations. Lorsque les réclamations n’entrent pas dans le champ des compétences du Médiateur de la République, les réclamants sont réorientés vers les services ou institutions compétents. C’est dire que le Médiateur a pour vocation de consolider et de renforcer l’Etat de droit et la bonne gouvernance. Le recours est gratuit, car il  n’y a aucun frais à payer. Cependant, la saisine du Médiateur ne suspend pas les délais légaux dont on dispose pour engager une action en justice.

Réalisée par  Oumarou Moussa(onep)

Source : http://www.lesahel.org