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M. Abdou Djerma Lawal, Directeur Général du FAFPA-Niger et Président du RAFPRO : « Nos Etats, pris individuellement, ne peuvent pas prendre en charge à eux seuls la question du financement de la formation professionnelle qui coûte excessivement chère»

Depuis juillet 2018, vous présidez aux destins du Réseau Africain des Institutions et Fonds de Formation Professionnelle (RAFPRO). Quel est son but et de quels moyens d’action dispose-t-il ?

Il faut d’abord rappeler que le RAFPRO a vu le jour en 2006 à Cotonou suite à la volonté de certains pays, appuyés par le Bureau international du travail, de se mettre ensemble pour échanger sur la question de la formation professionnelle. Mon élection en 2018 comme président de ce réseau, faut-il le rappeler, est intervenue alors que j’étais à la tête du FAFPA-Niger depuis 2014.Ceux qui connaissent un peu le Fonds à l’époque savaient qu’il était embryonnaire et qu’il fallait mettre toutes les soupapes en marche pour qu’il soit un Fonds digne de ce nom. C’est ce bond que le FAFPA a connu au Niger qui a émerveillé les autres pays membres de ce réseau, des pays francophones d’Afrique centrale et occidentale, qui ont jugé utile de chercher quelqu’un qui a une expérience et qui a eu des résultats dans son pays, de me proposer pour la candidature à la présidence du réseau. Et c’est ainsi qu’en juillet 2018 à Dakar, j’ai été élu avec une majorité écrasante président du réseau pour la première fois.

Très rapidement, nous nous sommes mis au travail avec les différents acteurs, c’est à dire les fonds et institutions membres du RAFPRO, les partenaires techniques et financiers, et les employeurs privés qui sont les acteurs locaux. On a fait en sorte que tous les acteurs se retrouvent autour de la question de la formation professionnelle et de l’employabilité des jeunes. Ainsi, pour la première fois au niveau du réseau, nous avons mis en place en 2018 un plan stratégique pour le développement de la formation professionnelle des pays membres, mais aussi des outils qui permettent d’assurer le développement dans les pays membres.

En plus de tout cela, il y’a eu aussi la création d’une filière au sein du RAFPRO pour la formation des conseillers en formation parce que, dans tout ce que nous faisons, tant que le capital humain n’est pas à la hauteur de la tâche, alors nous ne pouvons pas avoir des résultats. C’est grâce à tous ces aspects que notre premier mandat a connu des résultats positifs et des succès, et c’est aussi à cause de cela qu’en 2021 à Cotonou, les autres pays m’ont renouvelé leur confiance en me choisissant pour un deuxième mandat de 3 ans comme président du RAFPRO.

A la suite de votre élection à la tête de cette structure panafricaine, plusieurs séances de formations sous régionales ont été réalisées. Peut-on dire que le RAFPRO est désormais opérationnel et que cela va s’inscrire dans la durée ?

Il est opérationnel dans la mesure où, aujourd’hui, nous avons au sein de ce réseau un groupe d’experts de la formation professionnelle qui se retrouvent régulièrement pour travailler, y compris à distance, pour élaborer certains outils qui visent un meilleur développement de la formation professionnelle dans nos pays. C’est ce qui a fait encore que plusieurs partenaires techniques et financiers nous ont rejoint, surtout lors de notre dernière rencontre de Sali au Sénégal, pour que nous discutions ensemble des modes alternatifs de financement de la formation professionnelle. Il est vrai que nos Etats, pris individuellement, ne peuvent pas prendre en charge à eux seuls la question du financement de la formation professionnelle qui coûte excessivement chère. Ce mode alternatif de financement doit être accompagné par de bonnes stratégies. C’est devenu une réalité aujourd’hui, le réseau des Fonds est en train de faire un travail gigantesque et il y’a déjà des partenaires qui se sont annoncés, comme la coopération Suisse et l’UEMOA, à agir au sein du RAFPRO pour soutenir la question de l’employabilité de la jeunesse africaine.

Concrètement, quel rôle joue le Réseau Africain des Institutions et Fonds de Formation Professionnelle dans le paysage de l’employabilité des jeunes du continent ?

Pour répondre aux exigences de ce monde en perpétuel changement, il y’a d’abord l’élaboration d’outils innovants dans le cadre de la gestion de la formation professionnelle, surtout que suite à la pandémie de COVID-19, nos pays se sont retrouvés isolées et bloqués. Il fallait donc s’adapter rapidement et mettre en place un autre dispositif de suivi de la formation professionnelle. C’est ainsi que le RAFPRO et les partenaires techniques qui l’accompagnent ont opté pour une dynamique de la digitalisation du réseau lui-même, et de la digitalisation de la formation professionnelle.

Un deuxième défi au niveau du RAFPRO qui va toujours dans ce même sens, c’est d’écraser les frontières au niveau continental quand on parle de la formation professionnelle. Il faut que le même plombier qu’il y’a à Brazzaville et le même plombier qu’il y’a à Niamey ou bien à Ouaga, que ce soit les mêmes rudiments qu’ils utilisent pour être formés afin d’avoir les mêmes compétences et il suffit à ce niveau de faire en sorte que le RAFPRO joue son rôle. Un autre aspect qu’il faut valoriser davantage est la mobilisation des ressources. De façon individuelle, il serait très difficile pour nos pays de mobiliser assez de ressources pour la question de la formation professionnelle surtout, et de l’employabilité des jeunes en particulier. C’est aussi parce qu’il n’y a pas une synergie d’actions que l’Afrique n’arrive pas à donner des réponses précises à la question de l’émigration.Mais avec des structures sous régionales ou bien régionales comme le RAFPRO, nous sommes aujourd’hui à même de dire qu’il y’a des partenaires qui sont en train de soutenir le réseau pour que des réponses précises soient apportées au problème de l’émigration et à celui de l’employabilité des jeunes parce que seule la formation professionnelle peut donner des solutions adéquates à ces problèmes.

Le RAFPRO tient à partir de ce mercredi 25 mai à Niamey les travaux de sa  13ème Assemblée Générale ordinaire. Est-ce l’occasion tant attendue d’appeler à la mobilisation générale des dirigeants des pays membres autour de la thématique de la formation professionnelle sur le continent ?

Le choix de ce thème que nous avons retenu pour la 13ème  assemblée générale du réseau n’est pas fortuit car il faut d’abord voir en cela l’objectif de l’employabilité de la jeunesse. C’est faire aussi le lien direct Formation-emplois des jeunes-insertion des jeunes. Cette thématique est aujourd’hui générale à tous les pays d’Afrique qui sont membres du réseau, et aussi à ceux qui sont entrain de rejoindre le réseau comme Madagascar et le Cap-Vert qui vont se prononcer officiellement à Niamey.

C’est l’occasion aussi de faire en sorte que les dirigeants africains prennent à bras le corps ce problème puisque les Fonds des pays membres sont des structures généralement étatiques, mais qui ont un fort lien avec les structures privées avec lesquelles nous développons un véritable partenariat public-privé à l’intérieur du réseau. Et, on ne peut pas faire un bon partenariat public-privé tant que les dirigeants ne sont pas associés. C’est l’occasion pour nous de lancer cet appel pour que tous nos dirigeants africains parlent d’une même voix et accompagnent les Fonds membres de ce réseau pour une meilleure solution en faveur de la jeunesse en Afrique.

En votre qualité de président du RAFPRO, quelle vision avez-vous pour l’Afrique dans ce secteur ?

La vision est partagée puisque nous avons des objectifs qui sont bien connus compte tenu de l’évolution de la technologie, du contexte actuel de pandémie et du contexte sécuritaire dans certains pays membres. Tout cela nous impose de nous adapter.

Le grand défi, c’est de faire en sorte que, dans le cadre des perspectives et quelle qu’en soit la situation, nos pays continuent à s’occuper de cette jeunesse qui en a tant besoin. Il y’a aujourd’hui des jeunes qui ont des diplômes et qui ne savent pas quoi faire, tout comme il y’a des jeunes qui n’ont pas été à l’école et d’autres qui sont déscolarisés. La seule solution à portée de main, c’est le développement des compétences qui permettra à chaque jeune de se prendre en charge lui-même, de prendre en charge une partie de la communauté et d’être utile pour son pays. C’est cela la réponse qu’il faut et c’est pour cela que nous disons au RAFPRO que le développement est une affaire de compétence.

C’est donc donner de l’espoir aux jeunes pour les maintenir dans leurs terroirs et leur permettre d’exploiter leurs compétences individuelles ?

Tout à fait! Il y’a assez d’opportunité dans nos pays, des gites de développement qui n’attendent que d’être exploités et on ne peut le faire qu’en ayant la volonté. Aujourd’hui, vous avez beau chercher à faire du bien dans un pays ou à une classe de la jeunesse, tant que la volonté n’y est pas, ça ne peut pas aboutir. C’est pour cela que nous continuons dans notre démarche, dans notre plaidoyer, dans notre sensibilisation, de faire en sorte que les jeunes viennent avec nous pour prendre le relais du développement de nos différents pays. C’est ça la réponse qu’il faut pour la jeunesse de notre chère Afrique.

Par Souleymane Yahaya(onep)